Confession d’un vil profanateur de cassoulet
Le délicieux Lewis a invité une foule de monde à venir manger un cassoulet chez lui le premier de chez Novembre.
Une foule de gens, dont moi.
Malheureusement, je ne pourrai être de ces fabuleux convives dans la mesure où d’une part, je consacre cette période à des dévotions familiales intenses au nord de la Seine (ou pas) et d’autre part parce que je me sens coupable du crime de lèse-majesté (sinon plus grave) envers ce plat ragoûtant en diable, en casserole et en bouche qu’est le cassoulet toulousain (ou pas)
Je décline cette invitation avec d’autant plus d’amertume que j’adore le cassoulet et que ça m’aurait fait un réel plaisir de le déguster en une telle compagnie dont je ne connais pas encore (hélas) tous les membres.
Ceci étant, si j’étais libre par ailleurs, je ne pourrais pas décemment me présenter devant cette assemblée et partager ses agapes frivoles sans succomber illico de chez Presto sous le poids et le remords du crime odieux que je pratique régulièrement envers ce plat quasi national pour ne pas dire planétaire et véritable trésor de l’humanité.
J’adore le cassoulet.
Mes parents le cuisinaient fort bien et le jour où ils ont (enfin) pu me virer de chez eux en me lançant seul et nu dans le monde jungleux, je cédais à cette addiction en achetant des boîtes de conserve de ce précieux plat car je n’avais ni le temps ni la vanité de me lancer dans une telle préparation qui tient de l’Art le plus accompli voire diablement divin.
Certes, ce n’est déjà pas très orthodoxe quoique l’on trouve maintenant des cassoulets en boîte pas trop mauvais et de plus, dotées d’une ouverture à clip des plus modernes et faciles.
J’avoue en aparté que j’ai jeté de rage pas mal d’ouvre-boîtes classiques à la poubelle ou par la fenêtre avant que d’aller chercher un sparadrap ou aller m’excuser auprès du voisin.
Certes la modernité fait encore que certains anneaux me reste malheureusement dans la main et que je dois achever la bête au marteau et au tournevis, mais ça devient quand même de plus en plus rare.
Je me fais un devoir de cuisiner cependant ce cassoulet en boîte en le versant dans un plat adapté (comme indiqué sur l’étiquette) et de passer le tout au four très chaud.
C’est une circonstance atténuante hein !
De plus (et c’est tout à mon honneur) je saupoudre au préalable le plat d’une chapelure de qualité.
J’ajoute souvent quelques noix de graisse d’oie (qui n’est pas la pire des graisses pour les artères, mais sans doute une des meilleures pour le goût) pour favoriser le gratin du tout.
Maintenant voici ma confession :
Amis Frivolibres et toulousains, amis gastronomes et amateurs de cassoulets universels et divins, je vous prie de bien me pardonner pour la cruauté et la sauvagerie des lignes qui vont suivre.
Avant la première couche de chapelure, je saupoudre toute la surface du plat d’une épaisse couche de fromage râpé (Emmental ou Gruyère)
Je mets la chapelure et par-dessus j’entasse encore du fromage et la graisse d’oie.
Oui, je sais, c’est particulièrement odieux comme pratique, mais il faut que vous sachiez que je suis shooté au fromage râpé depuis ma plus tendre enfance : J’en mets partout et dans n’importe quoi.
J’en mets toujours et même dans le cassoulet en boîte (ou pas)
Je ne peux pas résister.
J’ai honte !
Je suis un damné !
Si, si, un ignoble damné d’hérétique grave et odieux.
Pardonnez-moi je vous en supplie !
Flagellez-moi au fouet clouté ; lacérez-moi de vos fourchettes d’argent ; dépecez-moi de vos laguioles rutilants ; brûlez-moi de vos fers et de vos yeux rougis par votre colère vengeresse et si compréhensible, mais surtout, pardonnez-moi !
Je suis un ignoble suppôt du fromage râpé qui ne mérite en aucune manière l’impunité, mais qui à genoux implore votre clémence bienveillante après votre juste châtiment et savant supplice.
Je ne le ferai plus jamais !
Plus jamais !
Jusqu’à la prochaine fois…
Parce que c’est trop bon !