La poignée veuve
Bonsoir,
j'ai travaillé la semaine dernière dans la bonne ville de T.
En écolo consciencieux, j'ai fait confiance à la SNCF : elle m'a fait aimer le train.
Je pris donc le train de 6h09, direct pour T.
Lecture
ensommeillée, visualisation compassée des sommets enneigés, sommeillage
matudinal : telles étaient mes occupations dans le rapide qui me menait
à T.
Comme à l'accoutumée, en garçon prévoyant, j'allais uriner les
mains dans les poches, peu de temps avant l'arrivée prévue à T., non
sans avoir demandé à mon camarade de compartiment, car c'était un de ces
wagons à compartiment comme autrefois, de surveiller mon cartable, dans
lequel j'avais réussi à glisser non seulement mes affaires de classe,
mais aussi mon slip, mes chaussettes sèches et ma chemise de rechange.
J'urine donc.
Je me lave les mains.
Je sors des toilettes.
Non, je ne sors pas : il n'y a pas de poignée à l'intérieur des WC : les WC étaient fermés de l'intérieur.
Je
me mets donc, rempli d'adrénaline, à tambouriner sur la porte,
craignant déjà de me retrouver enfermé jusqu'à L. ou P. ou B. (terminus
du train) et de rater par là même mon cours : adieu veaux, vaches,
cochons, poulets.
Le contrôleur est heureusement passé par là et m'a délivré.
Ouf.