Le canapé rouge
Sur un chemin de
terre, un homme roulait une cigarette, debout, près d'un side-car vert, scarabée
géant, compagnon de solitude.
Il avait ainsi vécu
seul, sans personne avec qui parler véritablement, jusqu’à cette panne dans le Marais
parisien. Quelque chose s’était cassée dans son ordinateur. Et comme il n’avait
avec lui ni hotline, ni ONG, ni président de la République, ni passagers, ni
journaliste accrédité, il se préparait à essayer de réussir, tout seul, une
réparation difficile. C’était pour lui une question de vie ou de mort. Il avait
à peine du vin à boire pour huit mois et aucune dose de vaccin contre le H1N1…
Le premier soir il
s’est donc endormi sur une poubelle à mille milles de toute terre inhabitée et
de toute boite de nuit homologuée par la moindre sous-préfecture. Il était bien
plus isolé qu’un breton rouquin dans un RER en panne au milieu de la banlieue
du 9-3. Alors vous imaginez sa surprise, au lever du jour, quand une drôle de
petite voix l’a réveillé. Elle disait :…
« S’il vous plaît…
dessine-moi un révolver !
— Hein !
— Dessine-moi un révolver…
»
Il a sauté sur ses
pieds comme s’il avait été frappé par une pub de parfum de luxe ou de café
vulgaire. Il a bien frotté ses yeux. Il a bien regardé. Et il a vu un petit réverbère
rose tout à fait extraordinaire qui le considérait gravement.
Note : Merci et mille pardons à Antoine de Saint-Exupéry pour avoir ainsi squatté et profané son superbe et légendaire texte.