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25 décembre 2005

Bouillon d’écriture n° 5 - Un Noël à Frivoli (3/3) – Conte de Noël de Martin Lothar

Troisième et dernière partie
Ce matin du 25 décembre, Mademoiselle Enne se réveilla comme une fleur après un sommeil des plus profonds et paisibles.
Pendant quelques secondes, elle se remémora la journée précédente : La tempête de neige, la panne de chaudière, l’arrivée impromptue de ces douze vieillards, la coupure de l’électricité, les sucettes de Madame Venne et les regards de la petite Emilie, enfin la remise en route miraculeuse du chauffage !
Et puis cette puissante et émouvante veillée où, dans la chapelle, jeunes et vieux avaient chanté avec une ferveur qu’elle n’avait jamais vécue auparavant.
Inquiète de l’état de ses plus anciens invités, elle se leva d’un bond et constata ainsi que sa chambre baignait dans une douce chaleur : La chaudière, miraculeusement réparée, avait tenu toute la nuit !

Elle se précipita dans la salle de bain et tourna les robinets, et quelle ne fut pas sa surprise de constater qu’une eau merveilleusement chaude coulait à jet puissant dans le lavabo : La plomberie de cet orphelinat avait-elle retrouvé sa première jeunesse ? Comme la chaudière !
Après s’être habillée, elle se précipita dans le couloir où elle fut aussitôt saisie d’effroi : Non seulement il y régnait une chaleur inhabituelle, mais en plus, les murs et les plafonds semblaient avoir été complètement repeints dans la nuit ! Le sol était comme neuf et elle remarqua ensuite que toutes les marches du vieil escalier central se présentaient comme si elles n’avaient jamais été foulées par aucun pied et comme faites de la veille !

Chancelante, Mademoiselle Enne se retrouva alors dans le grand couloir menant à la chapelle, où, comme elle le présageait, tout l’orphelinat était déjà là, les petits comme les grands, et l’attendait dans une impatience non dissimulée.
Mademoiselle Enne traversa alors un chaleureux buisson de baisers, de caresses, de mots doux et de cris fervents et se retrouva face au père Carrol qui de son corps défendant et dans l’attente de la « patronne » barrait la porte de la chapelle.
Inconsciemment alors, elle frappa à ma porte, l’ouvrit et passa la tête pour vérifier si tout son petit monde pouvait entrer sans trop heurter l’intimité des anciens.
Il y avait alors un profond silence dans ce couloir.
Un silence qui précéda et réverbérera dans les mémoires le cri de Mademoiselle Enne :
- Mon dieu, mais qu’est-ce que c’est !

Mademoiselle Enne s’évanouit alors en tombant dans les bras ouverts du père Carrol.
Ce dernier ne put alors empêcher toute la communauté de s’engouffrer aussitôt – d’un seul homme – dans la chapelle.
Là, ils furent tous saisis de la plus grande stupéfaction de toute leur vie, le spectacle était fabuleux :

Le plafond de la chapelle avait été transformé en voûte étoilée où fusaient sans cesse des météores de toutes les tailles et de toutes les couleurs.
Les parois du bâtiment avaient été revêtues de marbres et de porphyre.
Toute la chapelle était baignée d’une lumière diaprée, mouvante et surnaturelle.

Les affreuses colonnes de bétons étaient désormais des fûts sans limites éclatants de bronze et d’airain où s’agitaient des lierres resplendissants.
Les tuyaux du petit orgue de la chapelle avaient décuplé de hauteur et autour de l’instrument exultant et vibrant sans aucun organiste, flottait un nuage d’angelots nus et joufflus qui chantaient d’une voix enivrante, en battant de leurs ailes d’argent, le Magnificat d’Antonio Vivaldi.

Le misérable sapin de plastique avait laissé place à un arbre indescriptible dont la cime se perdait dans la nouvelle voûte d’étoiles.
Dans les branches de l’arbre, sautaient des dizaines de ouistitis blancs comme neige et criards comme des nourrissons affamés et des écureuils bleus, blancs et rouges.
Il y avait aussi des oiseaux de toutes les tailles et de toutes les couleurs qui chantaient à l’unisson de l’orgue et des anges en voltigeant dans tous les sens.
Au plus haut d’une branche, se tenait une gigantesque chouette dorée.
Au pied de l’arbre, il y avait un amoncellement de paquets cadeaux dont la moitié était ouverte et d’où sortaient les jouets les plus fabuleux et jamais rêvés.
Derrière une pile d’une trentaine d’Ibooks flambant neufs, se dressait une réplique de la cathédrale d’Amiens, de la taille d’un homme et faite toute en legos.

Les orphelins poussèrent ensemble un cri mémorable quand, à quelques mètres d’eux, passa un troupeau de dizaines de moutons – plus vivant tu meurs – dont chaque bête était de la taille d’un chaton. Le berger, à l’échelle de ses animaux, salua les enfants éblouis en retirant son béret basque.
Le troupeau se dirigeait vers la crèche, qui avait été transformée en une énorme bulle de savon, rutilante, au centre de laquelle s’agitait un vrai bébé bien vivant.
Le nouveau-né (trop trognon) était entouré d’une vierge dans laquelle tous les orphelins reconnurent aussitôt leur mère et d’un Joseph, dans lequel ils reconnurent tous leur père.
L’âne était grandeur nature et d’un bleu outremer.
Le bœuf idem, mais rouge sang.
Il y avait aussi toute une ménagerie miniature semblant aussi vivante que les moutons.
Au sol flottait une brume diaprée, étonnante et turbulente qui découvrait par moments des pavés de diamants et de rubis.

Des petits canons miniatures installés aux quatre coins de la chapelle, tonnaient périodiquement et lançaient des confettis multicolores, des bonbons, des carambars et des malabars. 

La grande table autour de laquelle la communauté prenait habituellement ses repas frugaux et qu’elle avait la veille, patiemment décorée de pièces bricolées de papiers et de cartons, était devenue un immense plateau orné de velours moelleux, de dentelles fines, de soies luxueuses, chargé de vaisselle d’or et d’argent et profus des mets les plus extraordinaires et ragoûtants.
Au centre, se dressait une magnifique pièce montée dégoulinante de caramel, de nougatine, de meringue, de crème fouettée, de chocolat et de poudre d’amande.

De chaque côté de ce gâteau, il y avait quatre fontaines : une, en or massif d’où jaillissaient des miels onctueux ; une autre, en jaspe, d’où dégoulinaient des confitures de tous fruits ; une troisième, en argent où bouillonnaient du chocolat et la dernière enfin, sculptée d’un bois rare, dispensait en trois vasques, des vins rouges, blancs et rosés.
Des petits nuages, gros comme des melons, survolaient la table et à chaque verre de cristal, de ciboire en or ou de hanap en argent, laissaient s’écouler ou du jus de fruits, du lait chaud, du café ou du thé vert.
Toute la communauté de l’orphelinat était médusée par un tel spectacle.

C’est alors qu’Arthur, le plus jeune des garçons, fit un pas en avant vers la table, par l’odeur, alléché !
Aussitôt de dessous de la table jaillit une myriade d’elfes et de lutins de la taille d’une bouteille qui s’activèrent autour des assiettes pour les remplir de pains au lait et au chocolat (chocolatines), de croissants, de noix, de figues, d’amandes, d’olives noires et vertes, de nougat, de fruits magnifiques, d’œufs brouillés ou à la coque et de truffes grosses comme des poings.
Le jeune Arthur (qui était très gourmand, il faut le dire) tomba alors sur les genoux et s’écria :
- C’est pas possible, je rêve !

Au bout de la table se tenaient douze personnages que l’orphelinat reconnut de suite comme étant les vieux visiteurs de la veille.
Ils étaient devenus douze jeunes hommes et jeunes femmes vêtus d’une simple tunique immaculée.
C’est alors que le docteur Suze qui présidait, assis au bout de la table, se leva lestement et se dirigea vers la crèche.

Comme par enchantement la bulle rutilante s’ouvrit à son passage et le docteur prit dans ses bras le nouveau-né qui rigolait tant qu’il pouvait.

Présentant le bébé à la communauté, le docteur Suze dit alors :
- Mes amis, mes enfants, voici mon fils Martin, notre nouveau sauveur. Je l’ai conçu cette nuit avec l’aide de Madame Venne. Il sera notre guide et notre serviteur pour les siècles et les siècles.

A ces mots, Sœur Giov, Mademoiselle Roxane et Mademoiselle Enne, à peine remise de ses émotions, s’évanouirent en chœur.

Le père Carrol s’écria :
- Nom de dieu, que c’est beau !

Monsieur Eva, l’intendant dit :
- Attendez-moi, je reviens, je vais pisser un coup !

Le jeune Arthur toujours à genoux s’exclama :
- Bon, quand est-ce qu’on mange ?

Le docteur Suze remit alors le bébé à Madame Venne, puis se tournant en souriant vers la communauté, il dit :
- Mes amis, mes sœurs, mes frères, mes enfants, venez donc, installez vous autour de cette table, prenez mangez et buvez car ceci est votre juste récompense.

Puis, écartant les bras, il s’exclama :
- Moi, Zeus, roi des dieux, en mon nom et en celui des onze déesses et dieux de l’Olympe ici présents, je vous souhaite à tous et à toutes un bon appétit et un joyeux Noël !

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Commentaires
E
Martin a-t-il des dons de double vue et les yeux bleus ? J'ai justement des problèmes de chaudière, le plafond de ma chambre s'effrite et tombe un peu partoutr, le sol de ma cuisine a sauté, les tapisseries se décollent, et j'aurais bien aimé que d'un coup de baguette magique tout devienne beau le matin de Noël.
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H
...que tu soupçonnes peut-être juste, Crooke!<br /> hihihi!
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C
Ben dis-donc, Mademoiselle Enne, elle a tout raté. Faut pas s'évanouir comme ça!<br /> <br /> J'aime beaucoup le mélange de l'ancien et du nouveau (les Ibooks et les malabars au milieu des angelots joufflus...)<br /> <br /> Sinon, je soupçonne l'exercice d'un chouia de mégalomanie quelque part vers la fin ;D
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H
........la chute!<br /> Superbe, nom de Zeus!
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