Tout est dans l'allure...
Hier, j'avais RV avec l'un des professeurs de mon fils Benoit-Lucien (antépénultième de la fratrie, aîné de Laurent-Jacques), au Lycée Raymond Naves, route d'Albi, 31200 Toulouse, trois étoiles dans le guide de l'Inspection Académique, récemment édité afin de redorer de blason de l'enseignement public et de palier l'engouement des parents d'élèves pour le privé, et la fuite des cerveaux (sic !) qui en résulte.
Alors que je patientai dans un vague couloir du deuxième étage d'un improbable bâtiment, je regardai par la fenêtre quelques élèves s'agiter sur une piste en terre battue, sous la houlette de leur professeur d'EPS.
Dans un tel groupe, le prof est facile à repérer : Il est le seul à être vêtu d'une tenue de sport, et il ne pratique pas d'activité physique. Il semble que le code déontologique inhérent à cette profession proscrive l'activité sportive durant les heures de cours, probablement jugée incompatible avec l'intégrité physique du corps professoral.
Après quelques tours de piste en guise d'échauffement, les jeunes se mirent à exécuter des pas divers et variés : pas chassés, sauts et autres pirouettes. Saluons au passage la performance du prof : tout autre personne voulant expliquer les figures à réaliser aurait cédé à la facilité et esquissé un pas ou deux, à titre d'exemple. Et bien non ! Celui-ci, admirable et superbe de dignité professorale, privilégia l'usage des mots à la stimulation purement mécanique de l'atavisme simiesque de ses élèves.
Cependant, nous le savons, faire appel à l'intelligence d'un ado, relève de l'utopie, alors, peut-être que l'étrange chorégraphie faisait suite à une consigne bien différente, c'est même probable. Ce n'est pas mon propos aujourd'hui, mais cela pourrait faire l'objet d'une étude sur la distorsion de l'information traitée par un cerveau adolescent. A titre d'exemple, lorsque je demande à l'un de mes enfants s'il a fait ses devoirs, il me répond invariablement : "Qu'est-ce qu'on mange ?" et à l'injonction : "Range ta chambre !" : "Où est la télécommande de la TV ?".
Alors que j'observai cet étrange ballet, il m'apparut que les jeunes exécutaient leurs exercices de manières bien différentes, alors que, selon toute logique, il partaient du même postulat. Certains évoluaient gracieux et aériens, d'autres patauds et gauches semblaient en difficulté ; l'envolée des uns prenait des allures de faux pas pour d'autres..
Je me demande si cette attitude est le reflet de leur façon de vivre. Cette élégance, ou, a contrario, cette maladresse apparentes correspondent-elles à une réalité plus profonde ? Sont-elles une des manifestations de l'intériorité d'une personne ?
A scénario égal, la vie est-elle pour certains une promenade bucolique et pour d'autres le parcours du combattant ?